Saisie de trois recours présentés par des propriétaires de parcelles classées en aléa fort de glissement de terrain par une carte d’aléa élaborée et publiée par les services de l’Etat en dehors de tout processus de révision du plan de prévention des risques naturels, la cour administrative d’appel de Bordeaux admet, contrairement à ce que qu’avait jugé le tribunal administratif, que ces propriétaires sont recevables à demander l’annulation de la décision du préfet refusant de modifier le classement de leur parcelle bien que cette carte d’aléa soit, en elle-même, dépourvue d’effets juridiques.
La cour a été saisie de trois recours dirigé contre le refus d’abroger une carte de l’aléa mouvements de terrain réalisée en dehors de tout processus de révision du plan de prévention des risques naturels, publiée sur le site internet de la préfecture et accompagnée d’un commentaire selon lequel cette cartographie du risque doit être prise en compte par la commune et l’État, notamment pour ce qui concerne la planification et les autorisations d’urbanisme. Ce document cartographique a également été transmis aux maires par les services de l’Etat en leur demandant de le prendre en compte immédiatement pour l’application du droit des sols. Au vu du classement issu de cette cartographie, le maire avait d’ailleurs refusé aux requérants des autorisations d’urbanisme ou leur avait opposé des certificats d’urbanisme négatifs dont la cour avait antérieurement confirmé l’annulation, par des arrêts du 29 août 2019 devenus définitifs.
Dans ces affaires, la cour fait une application positive de la décision du Conseil d’Etat CE, Section, 12 juin 2020, Groupe d'Information et de Soutien des Immigré.e.s (GISTI), n° 418142 pour apprécier la recevabilité de recours pour excès de pouvoir contre des documents généraux de l’administration. Elle juge, après avoir constaté que la carte d’aléa oriente dès sa communication, de manière significative, les autorités compétentes dans l’instruction des autorisations d’urbanisme et qu’elle est de nature, compte tenu de sa publication sur le site internet de la préfecture, à influer de façon notable sur la valeur vénale des terrains concernés, que le document cartographique et le refus du préfet de le modifier peuvent faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir.
Au fond, dans ces affaires, la cour estime que le classement en aléa fort des parcelles des requérants, qui produisaient plusieurs expertises, est entaché d’erreur manifeste d’appréciation. Elle annule ainsi le refus de l’administration de modifier ce classement et enjoint au préfet d’y procéder dans un délai de 4 mois.