Dès lors qu’il ne s’agit pas d’un complément alimentaire mais d’un « médicament par présentation » n’ayant fait l’objet d’aucune autorisation de mise sur le marché, le produit dénommé « Fleurs de Bach » ne saurait bénéficier de l’application d’un taux réduit.
Il résulte du code général des impôts que, lorsqu’ils ont fait l’objet d’une autorisation de mise sur le marché délivrée par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, les médicaments bénéficient d’un taux de taxe sur la valeur ajoutée réduit, voire très réduit. S’ils ne remplissent pas cette condition, en revanche, ils ne relèvent d'aucune des catégories bénéficiaires d'un taux spécial de taxe. Notamment, la qualification de « médicament » exclut celle de « complément alimentaire » qui ouvre droit, également, à l’application d’un taux réduit. Par suite, ces médicaments non autorisés doivent se voir appliquer le taux normal.
A l’issue d’un contrôle, l’administration fiscale a constaté qu’une parapharmacie vendait un produit dénommé « Fleurs de Bach » ou « Elixirs floraux du docteur Bach » au taux réduit de taxe applicable à l’alimentation et aux compléments alimentaires. Elle a considéré qu’il s’agissait pourtant, non pas d’un complément alimentaire, mais d’un médicament. Celui-ci n’ayant pas fait l’objet d’une autorisation de mise sur le marché, aurait dû se voir appliquer le taux normal de taxe. L’administration a donc assigné à la parapharmacie des rappels de taxe correspondant à la différence entre le taux normal et le taux réduit. N’ayant pas obtenu gain de cause contre cette imposition devant le tribunal administratif, la parapharmacie en a saisi la cour.
Selon le code de la santé publique, on entend d’abord par médicament, évidemment, les substances ou compositions pouvant être utilisées ou administrées en vue, soit d’établir un diagnostic médical, soit de restaurer, de corriger ou de modifier des fonctions physiologiques chez l’homme ou l’animal – c’est le médicament par fonction. Mais on entend également par médicament « toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l'égard des maladies humaines ou animales » - c’est le médicament par présentation. Cette définition légale, issue d’une ordonnance du 23 septembre 1967, tend à empêcher le charlatanisme pharmaceutique en soumettant les médicaments par présentation aux mêmes règles et aux mêmes contrôles que les médicaments par fonction.
Un produit est « présenté comme » possédant des propriétés curatives ou préventives lorsqu'il est « décrit » ou « recommandé » expressément comme tel, éventuellement au moyen d'étiquettes, de notices ou d'une présentation orale. Ce produit est également un médicament par présentation lorsqu’il apparaît, de manière même implicite mais certaine, aux yeux d'un consommateur moyennement avisé, que ledit produit devrait, eu égard à sa présentation, avoir les propriétés en cause.
La cour a relevé que les fleurs de Bach faisaient l’objet de guides les présentant comme le fruit des travaux d’un médecin ayant mis au point « une solution naturelle pour mieux gérer ses émotions ». Commercialisées sous forme de flacons, elles étaient censées constituer un complément alimentaire compatible avec d’autres traitements, à administrer sous forme de gouttes, pures ou diluées, selon une posologie définie avec précision. Un site internet consacré aux fleurs de Bach précisait qu’il en existe trente-huit préparations, « chacune conçue spécifiquement pour cibler un état émotionnel différent ». Selon ce site, elles étaient susceptibles d’« apporter des solutions à l’autisme, à la dépression et autres maladies émotionnelles ». Dans ces conditions, ce produit était de nature à apparaître aux yeux d’un consommateur moyennement avisé comme ayant des propriétés curatives ou préventives. Il s’agissait donc, non pas d’un produit alimentaire, mais d’un médicament par présentation.
Pour ce motif, la cour a validé l’application à ce produit du taux normal de taxe sur la valeur ajoutée.