Par un arrêt du 5 mai 2015, la cour administrative d’appel de Bordeaux rappelle que l’indemnisation de préjudices résultant d’actes médicaux non fautifs, au titre de la solidarité nationale, n’entre en jeu que si les préjudices subis par la victime présentent un caractère de gravité suffisant. Par ce même arrêt, la cour tire également les conséquences de la réévaluation à la hausse, en appel, d’un poste de préjudices pour la détermination des droits respectifs de la victime et de l’organisme de sécurité sociale.
En mai 2004, M. X a été victime d’un accident de travail ayant entraîné une entorse du pouce gauche. Il a été soigné pour cela au centre hospitalier universitaire de Toulouse. Par jugement du 23 avril 2013, le tribunal administratif de Toulouse, saisi par M. X, a mis à la charge de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), au titre de la solidarité nationale, une indemnisation pour réparer les préjudices résultant des douleurs supportées par M. X à la suite des soins qui lui ont été administrés. Le tribunal a aussi condamné le centre hospitalier universitaire à raison d’une faute.
Par arrêt du 5 mai 2015, la cour administrative d’appel de Bordeaux réforme le jugement en rappelant que la mise en jeu d’une indemnisation au titre de la solidarité nationale, sur le fondement des dispositions du II de l’article L. 1142-1 du code de la santé publique, est conditionnée par l’anormalité du préjudice. Pour ce faire, la cour relève qu’aucun élément n’est de nature à établir que les interventions pratiquées au centre hospitalier ont eu des conséquences plus graves pour M. X. que celles auxquelles il était exposé du fait de sa pathologie en l’absence de traitement. Elle relève aussi qu’aucun élément ne permet non plus d’établir que le risque de complications auxquelles M. X était exposé du seul fait de son état de santé antérieur à ces interventions présentait une faible probabilité. La cour en déduit que le dommage ne peut être regardé comme anormal au regard de l’état de santé du patient comme de l’évolution prévisible de cet état (cf. CE, 12 décembre 2014, Mme Bourgeois, n° 365211 et CE, 29 avril 2015, M. Tonnelier, n° 369473).
Par ailleurs, dans ce même arrêt, la cour fait application du principe de l’attribution prioritaire à la victime de l’indemnité réparant les préjudices, en application de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la loi de financement de la sécurité sociale du 21 décembre 2006 (cf. CE, section, avis, 4 juin 2007, Lagier et autres, n° 303422, p. 228). La cour juge que lorsque le montant de l’indemnisation d’un poste de préjudice susceptible de revenir à la victime est revu à la hausse en appel, mais que celle-ci n’a pas présenté de conclusions à cette fin, il doit être tenu compte du montant ainsi réévalué pour déterminer le solde revenant à l’organisme de sécurité sociale. En conséquence, la somme que le centre hospitalier doit verser à l’organisme de sécurité sociale peut être diminuée sans que celle que cet établissement doit verser à la victime ne soit augmentée.