Par deux délibérations du 6 juillet 2018 et du 12 juillet 2019, Bordeaux Métropole a, en application de l’article 88 de la loi du 26 janvier, défini, pour ses agents, un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l’expertise et de l’engagement professionnel (RIFSEEP) en s’inspirant de celui institué, pour les agents de l’Etat, par le décret du 20 mai 2014 portant création de ce régime.
Il résulte de l’article 88 de la loi du 26 janvier 1984 qu’il revient à l’assemblée délibérante de chaque collectivité territoriale de fixer elle-même la nature, les conditions d’attribution et le taux moyen des indemnités bénéficiant aux fonctionnaires de la collectivité, sans que le régime ainsi institué puisse être plus favorable que celui dont bénéficient les fonctionnaires de l’Etat d’un grade et d’un corps équivalents au grade et au cadre d’emplois de ces fonctionnaires territoriaux et sans que la collectivité soit tenue de faire bénéficier ses fonctionnaires de régimes indemnitaires identiques à ceux des fonctionnaires de l’Etat.
Il découle également de l’article 88 de la loi du 11 janvier 1984 que les collectivités territoriales, qui souhaitent mettre en œuvre un régime indemnitaire lié aux fonctions lorsque les services de l'Etat servant de référence bénéficient d'une indemnité servie en deux parts, doivent le faire en décomposant aussi l’indemnité en deux parts. Dans ce cas, la première de ces parts tient compte des conditions d’exercice des fonctions et la seconde de l’engagement professionnel des agents. Les collectivités territoriales qui décident de mettre en place un tel régime demeurent libres de fixer les plafonds applicables à chacune des parts, sous la réserve, compte tenu du principe de parité, que leur somme ne dépasse pas le plafond global des primes accordées aux agents de l’Etat servant de référence, et de déterminer les critères d’attribution des primes correspondant à chacune de ces parts.
Bordeaux Métropole a institué, pour ses agents, une indemnité de fonctions, de sujétions et d’expertise ainsi qu’un complément indemnitaire annuel. L’indemnité de fonctions, de sujétions et d’expertise est attribuée selon les critères suivants : fonctions d'encadrement, de coordination, de pilotage ou de conception ; technicité, expertise, expérience ou qualification nécessaires à l'exercice des fonctions, sujétions particulières ou degré d'exposition du poste au regard de son environnement professionnel. Le complément indemnitaire annuel est une indemnité facultative liée à l’engagement professionnel et à la manière de servir.
En subordonnant le versement du complément indemnitaire annuel « à la performance et aux résultats » ainsi qu’à « l’engagement professionnel et à la manière de servir » des agents, Bordeaux Métropole n’a pas retenu des critères d’attribution insuffisamment précis, de tels critères correspondant au contraire à la finalité de l’indemnité en cause qui est de récompenser la valeur professionnelle des agents.
En limitant le versement du complément indemnitaire annuel aux groupes de fonctions « emploi fonctionnel », « adjoint au directeur général », « directeur ou directeur de mission » et « agents de collecte et de conduite exerçant leur fonction au service de la collecte des déchets ménagers et assimilés » sans étendre le versement de cette indemnité aux agents des autres groupes de fonctions, alors même que les agents de l’Etat appartenant à des groupes de fonctions équivalents bénéficient quant à eux de cette indemnité, Bordeaux Métropole n’a pas davantage méconnu l’article 88 de la loi du 26 janvier 1984, lequel n’oblige pas une collectivité territoriale à faire bénéficier ses agents de régimes indemnitaires identiques à ceux des fonctionnaires de l’Etat.
En revanche, en prévoyant un régime d’indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise moins avantageux pour ses « collaborateurs non permanents », Bordeaux Métropole a, eu égard à la finalité que poursuit l’attribution de cette indemnité et à ses critères d’attribution, méconnu le principe d’égalité dès lors que ces agents non permanents ont vocation à occuper des emplois permanents et à exercer des fonctions qui ne sont pas différentes de celles susceptibles d’être occupées par des agents titulaires.
Cette illégalité est de nature à remettre en cause l’équilibre global du régime indemnitaire institué compte tenu de l’obligation qui s’impose à la collectivité de ne pas dépasser le plafond global des primes octroyées aux agents de l’Etat.
En conséquence, la cour confirme l’annulation de la délibération du 6 juillet 2018 prononcée par le tribunal administratif de Bordeaux dans sa totalité et, par voie de conséquence, l’annulation de l’article 4, seul contesté, de la délibération complémentaire du 12 juillet 2019. Elle confirme le différé d’annulation au 1er juin 2021 prononcé par le tribunal afin de limiter les effets sur l’ordonnancement juridique d’une annulation rétroactive.
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